La grande crèche provençale de Michel V. de Belgique (première partie)
Publié le 12 Mars 2017
Cher(e)s ami(e)s,
Nous quittons la frontière française pour nous rendre en Belgique et pour admirer une véritable crèche provençale sans la partie de boules, la partie de cartes...
Une crèche qui respecte la tradition avec Michel. Ce dernier est à la fois un historien des santons et des crèches, il est diplômé de l'école des Beaux-Arts de Belgique, il a également été le conservateur d'une des plus grandes expositions de crèches.
Je vais vous présenter la crèche de Michel exposée chaque année à l'église de Saint-Remacle en Belgique. Par honnêteté intellectuelle, je précise que ce dernier est également l'auteur des textes explicatifs.
Pour donner un aperçu de la crèche, la toile située juste derrière est également peinte par Michel mesure 11 mètres de long.
Les santons, sculptés par Michel font 45 cm de haut et pèsent environ 3 kg.
Tous les accessoires sont également de lui, le mas que nous voyons mesure 1m25 de haut, le moulin 90 cm de haut.
Pour vous donner une idée de la grandeur de cette réalisation, voici Michel, en train d'installer la crèche de Noël 2015...
Il a fallu plus d'une tonne de souches pour le décor.
Nous débutons la visite avec la partie située à gauche avec la bohémienne représentée avec 3 cartes de tarot à la main, inspirées du tarot marseillais qui fait référence à Nicolas Conver représentants les 3 arcanes, la mort, le pendu et l'église.
Une jeune Arlésienne est en train de discuter avec deux autres personnes.
Arlésienne en costume de Provençale (Arlatenco en atrencaduro de Prouvençalo).
Grande tenue endimanchée. La jeune femme est coiffée du ruban de velours à fond blanc en harmonie avec le reste du costume de la fin du XIXe siècle. Chez l'Arlésienne classique la casaque est coordonnée à la jupe. Lorsque l'éso est noire, on désigne le costume sous le nom de costume de provençale. Son offrande, propre au Pays d'Arles, préfigure, sous la forme de dons symboliques (un quignon ou une miche de pain, des grains de sel, une allumette, une paire d'œufs) les vertus morales et de prospérité souhaitées au nouveau-né. Le sel éloigne les mauvais génies qui se pressent autour du berceau.
Que ton enfant soit : Siegue toun enfant :
Bon comme le pain Bon coume lou pan,
Sage comme le sel de la terre Sage coume la sau de la terro,
Droit comme l'allumette et Dreu coume la brouqueto e
Fécond comme l'œuf. Plan coume l’ióu.
L'Arlésienne discute avec Bartoumieù ou Pistachié. Valet issu des pastorales, pièces de théâtre qui racontent la Nativité du Christ en vers provençaux, c'est le comique et le galéjeur de la crèche. Dans la Pastorale de Maurel (1844), il a peur de son ombre et tombe dans le puits. Dans celle du théâtre Chave (1862), il s'est habillé à la hâte, il a oublié ses bretelles. Cabaretier de son état, il aime les filles et le bon vin. Ses mains déjà occupées par la remise à niveau de son pantalon sont chargées de la morue, la merluso, mangée lors du gros souper qui précède la messe de minuit et de la pompe, le gâteau de Noël. Il porte également deux gros paniers de victuailles.
La poissonnière fait partie de cette discussion (la peissouniero). Personnage typiquement marseillais, elle arbore fièrement sa balance romaine accrochée à la ceinture. Son panier appelé laveuse est rempli des plus beaux poissons de la Méditerranée : on peut y voir les rascasses, les saint-pierre, les girelles,... Son costume est celui des femmes du peuple vers 1830-1840 : jupon piqué et caraco à manches gigots ici taillé dans une étoffe ancienne appelée aux bonnes herbes. Elle porte la coiffe à corduro (le nom vient de la couture centrale) dont les brides, les veto, flottent au vent.
Derrière ces 3 personnages en train de discuter se tient le gardian (lou gardian). Personnage beaucoup moins courant de la crèche provençale dont la présence est souvent limitée à la Camague et au Pays d'Arles. Berger à cheval, gardien des bióu, taureaux sacrés de la Camargue, il dresse fièrement vers le ciel son trident. Il porte enroulé autour du buste, lou seden, tressé avec le crin des juments qui est utilisé encore de nos jours comme lasso, rênes ou lien. Le gardian montait autrefois en sabots. Pour protéger ses jambes des moustiques et de la mouillure du marais, il enfilait une sorte de bas de toile imperméable lacés aux genoux, les garamacho.
Au loin, sur le pont, on aperçoit le meunier (lou mounié). Santon de 30 cm, il arrive du lointain. C'est un personnage qui jouait autrefois un rôle prépondérant dans la vie économique du village. Il apporte sa plus belle farine. Il est célébré dans les pastorales où il propage la nouvelle de la Nativité car, de son moulin situé au sommet de la colline, il jouit d'un poste d'observation privilégié.
Nous apercevons au fond sur les marches de la maison située devant le moulin, le porteur d'ail ( l’ome au rèst d’aiet).
Vieux paysan assis faisant une courte halte durant la route vers Bethléem, il assemble en tresses les gousses d'ail aux vertus médicinales et culinaires. Il apporte aussi une bouteille d'huile pour confectionner l'aïoli.
A la fenêtre de la maison, nous apercevons l'Etonnée (l'Estounado). C'est une version féminine du Ravi appuyée à la fenêtre. Elle porte un costume d'Arles des environs de 1800. C'est à cette époque que les premiers rubans de taffetas sont portés par les Arlésiennes sur une coiffe à bridoires maintenue par le plechoun, triangle de mousseline passé sous le menton, et noué au sommet de la tête.
Petit clin d'oeil sur l'appui de fenêtre, on peut voir les blés de Ste-Barbe qui sont mis à germr le 4 décembre sur du coton. C'est avec eux que commence en Provence la période calendale et les préparatifs du temps de Noël. Prémices des moissons futures sous la forme du blé en herbe, ils seront présents sur la table de Noël et ensuite dans la crèche. Ceux-ci sont découpés dans le métal d'une cannette d'un soda bien connu. La lanterne en laiton est ancienne.
Je vous proposerais de découvrir la suite de la découverte des personnages de cette immense et belle crèche provençale dans le prochain billet.
Bon dimanche